ITALIE • Silvio Berlusconi, ce grand irresponsable | Courrier international

11 Marzo 2010 0 Di ken sharo

ITALIE • Silvio Berlusconi, ce grand irresponsable | Courrier international.

L’offensive du chef du gouvernement face au fiasco des listes électorales de son parti, à deux semaines des élections régionales, révèle son inconséquence et son irresponsabilité, estime Massimo Giannini dans La Repubblica.

De l’abus de pouvoir à “l’injustice”. De la violation des règles aux “violences subies”. La “leçon” que le président du Conseil a assénée à l’Italie démocratique [lors d’une conférence de presse, le 10 mars] se résume à une énième manipulation des faits, doublée d’une habituelle inversion des rôles. Les “responsables” du désastreux imbroglio des listes électorales ne sont pas les dilettantes du Parti de la liberté (PDL, parti de Silvio Berlusconi) qui ont présenté les listes incomplètes [dans le Latium et en Lombardie] au-delà des délais légaux, mais les radicaux querelleurs et les juges communistes qui leur ont fait barrage [Silvio Berlusconi a accusé l’opposition d’avoir eu recours à des méthodes crapuleuses pour obtenir le rejet des candidatures de sa coalition].

 Selon lui, ce n’est pas au gouvernement de répondre du micmac auquel a donné lieu la promulgation d’un décret-loi visant à faire passer en force les listes du PDL, mais aux petits juges “formalistes” du tribunal administratif régional, ainsi qu’aux pinailleurs du Conseil constitutionnel qui l’ont rejeté et aux journalistes menteurs qui l’ont critiqué.

Encore une fois, comme on l’a vu tant de fois depuis 1994 [date à laquelle il a été élu pour la première fois président du Conseil], l'”homme d’Etat” Berlusconi évite soigneusement d’assumer ses responsabilités face au pays. Sa conférence de presse résume la stratégie de la manipulation politique et sémantique sur laquelle se fonde le phénomène berlusconien tout entier : schistogénèse (provocation de l’ennemi) et mythopoiesis (idéalisation de soi). 

Non seulement le président du Conseil se refuse à présenter des excuses aux électeurs pour les erreurs commises, mais il accuse ses adversaires de fautes dont ils ne sont pas les auteurs. Ainsi, le Cavaliere célèbre une fois de plus sa métamorphose magique : le vrai bourreau se transforme en fausse victime, le persécuteur autoritaire se transmue en persécuté de la loi, l’important étant de bien mélanger les cartes et de jeter la confusion dans l’opinion publique. Dans la logique berlusconienne, l’Etat de droit est une complication inutile.

Mais, cette fois, il manque un élément essentiel à son art consommé de la “contrefaçon” : l’irréfutabilité des faits. Dans cette affaire du fiasco des listes, malheureusement pour le Cavaliere, les faits sont vérifiables. Sa très personnelle “version des faits”, méticuleusement rebâtie dans les neuf feuillets qu’il a lus in extenso, est mise à mal par deux documents officiels : les motivations par lesquelles le tribunal administratif régional a rejeté le recours du PDL dans le Latium ; et les procès-verbaux rédigés par les carabiniers du commandement de la région de Rome. Pour connaître la vérité, il suffit de les lire.

Quelle que soit l’issue du vote du 28 mars [premier tour des élections régionales], l’homme que nous avons vu à la conférence de presse du 10 mars ne paraît plus en mesure (si tant est qu’il l’ait jamais été) de reprendre le chemin des réformes nécessaires et de ramener le pays sur le chemin de la croissance économique, de l’équité fiscale et de la modernisation sociale. La politique berlusconienne tout entière consiste et s’épuise en quelques sursauts nerveux dictés par l’urgence : des opérations d’autopromotion lors de catastrophes à l’échelle nationale, ainsi que du forcing parlementaire pour imposer des exigences personnelles (procès court, loi de l’empêchement légitime). Pour le reste, l’action gouvernementale est depuis des mois dévitalisée, vidée et réduite à la survie.