Avec le rachat de Fox, Disney peut écraser le marché du divertissement – Libération

15 Dicembre 2017 0 Di uboot96

liberation.fr- Avec le rachat de Fox, Disney peut écraser le marché du divertissement. La constitution d’un catalogue colossal d’œuvres place le studio en position de force sur le marché de la diffusion numérique face à des poids lourds comme Netflix. – Par Christophe Alix et Jérôme Lefilliâtre

Ace niveau-là, on peut parler de «mégadeal». Comme prévu, la Walt Disney Company a annoncé jeudi le rachat d’une grande partie du groupe 21st Century Fox, contrôlé par le magnat Rupert Murdoch (qui conserve sa chaîne d’information Fox News).

Montant de l’opération : 52 milliards de dollars (42 milliards d’euros), auxquels s’ajoutent 14 milliards de dette. La transaction reste soumise à l’approbation des autorités américaines de la concurrence, ce qui n’est pas une formalité : la fusion annoncée il y a un an entre l’opérateur télécom AT&T et le groupe de médias Time Warner reste à ce jour bloquée par la justice américaine.

Si cette transaction-là est validée, elle est de nature à bouleverser le paysage mondial des médias et du divertissement.

Car c’est un géant pesant 160 milliards de dollars en Bourse qui reprend l’essentiel d’un autre géant, valorisé 60 milliards de dollars par les marchés.

Le créateur de Mickey Mouse et de la Reine des neiges, qui possède déjà des quantités de chaînes de télévision (ABC, Disney Channel, le bouquet sportif américain ESPN…), des parcs d’attractions et des studios de production prestigieux (la galaxie Disney, Marvel, Pixar, le Lucasfilm de Star Wars), s’apprête à mettre la main sur d’autres actifs très convoités, dont les studios de production cinéma et télé 20th Century Fox, qui inondent nos écrans de films et de séries depuis des décennies.

L’empire Disney veut s’étendre avec la 21st Century Fox

C’est en leur sein qu’ont notamment été créées les séries des Alien et des films X-Men, mais aussi la Planète des singes, Avatar, Homeland ou encore les Simpson. Cet accord acte la naissance d’une usine à contenus d’une puissance inégalée.

«L’acquisition de cette constellation “galactique” d’activités de la 21st Century Fox répond à la demande croissante des consommateurs pour une diversité d’expériences de divertissement plus riche et accessible que jamais», a commenté l’inamovible patron de Disney, Bob Iger, à la tête du groupe depuis 2005 et qui doit rester aux commandes jusqu’en 2021.

Panier

«L’opération consolide deux studios, pour atteindre une taille que n’a jamais connue Hollywood, constate un très bon connaisseur des deux entreprises.

La complémentarité artistique, éditoriale, est très importante : Disney est très fort dans le divertissement pour les enfants et la famille, Fox l’est dans celui pour les adolescents et les adultes. Il se crée un acteur sans commune mesure avec les autres majors américaines du cinéma et de la télévision ou avec Netflix.»

Avec ce rachat, c’est au niveau des mastodontes de la Silicon Valley et nouvelles terreurs d’Hollywood – Apple, Google, Facebook et Amazon – que se hisse Disney.

Car le panier n’est pas seulement rempli de capacités de production pour la télévision et le cinéma. Outre des chaînes diverses et variées, dont le réseau documentaire National Geographic, Disney récupère aussi dans l’affaire des grandes plateformes de distribution, accroissant son empreinte planétaire.

Il devient ainsi l’actionnaire majoritaire de Hulu, le service de streaming américain qui a récemment produit la série The Handmaid’s Tale, et prend le contrôle de Star India, la grande filiale audiovisuelle asiatique détenue par Fox.

L’Europe des médias est également touchée : Disney reprend les 39 % de la Fox dans le bouquet Sky, l’opérateur britannique de télévision payante et de télécommunications qu’il souhaite racheter en totalité.

Active au Royaume-Uni, en Irlande, en Allemagne, en Autriche et en Italie, l’entreprise a 22 millions d’abonnés à travers le continent, pour un chiffre d’affaires annuel de 15 milliards d’euros. Sa possible arrivée en France (par le rachat de Canal un jour ?) est une rumeur récurrente.

Baston

La maîtrise de Hulu, Sky et Star India fournira à Disney les moyens technologiques de son grand virage stratégique en cours. Historiquement simple producteur de films, séries et dessins animés diffusés chez des distributeurs partenaires hertziens, câblo-opérateurs et satellitaires, le groupe dirigé par Bob Iger compte servir directement les consommateurs dès l’an prochain.

Lancé dans une baston anti-Netflix, Disney compte bien le dépasser sur son terrain en distribuant à ses abonnés ses contenus via Internet : un nouveau service en ligne, reprenant les contenus d’ESPN, doit être lancé au printemps, avant le grand service de streaming du groupe prévu seulement pour un lancement au deuxième semestre 2019.

«Bousculé par les “pure players” d’Internet, Disney fait le même parcours qu’eux, mais dans le sens inverse, explique le spécialiste des médias numériques Philippe Bailly. Après avoir mis la main sur des catalogues gigantesques de contenus, il se concentre maintenant sur leur distribution directement en ligne.

Le contraire de Netflix, qui a d’abord construit son infrastructure de distribution avant d’investir massivement dans des productions qu’il réserve à ses seuls abonnés.»

Une seule certitude : ça va saigner dans une guerre que certains experts outre-Atlantique ont surnommée Game of Thrones.

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